Le crâne de pierre

Le crâne de pierre


Le crâne de Pierre, 2001

Le hasard est un choix, USTL, Villeneuve d’Ascq, 2002 – Musée d’art et d’histoire de Langres, 2004

Musée Archéologique de Strasbourg, 2009 – Habiter poétiquement, LaM, Lille, 2010

Cailloux, colle.
Pebble, glue.

 » Après avoir participé à des fouilles archéologiques préhistoriques, j’ai combiné dans cette oeuvre trois étapes spécifiques : la fouille, le tri, la reconstitution.
La fouille consiste à gratter, à chercher. Sur un site, chaque micro-élément découvert peut être le reliquat d’une industrie importante et est donc conservé. J’ai considéré que sur n’importe quel site, n’importe quel caillou pouvait avoir 50 millions d’années. Résonnait alors dans ma tête Futur, ancien, fugitif d’Olivier Cadiot et cette interrogation : « On ne trouve pas un bras de pierre sans trouver le reste ensuite : culte, inversion de cadavres? Technique rituelle? » (1)
Le tri est une pratique qui vaut à certains archéologues novices d’être surnommés « les mangeurs de cailloux ». Car, pour distinguer un os d’un caillou, ils le posent sur la langue : si ça colle c’est un os, si ça glisse c’est un caillou! Par ailleurs, c’est un assemblage de plusieurs textes qui a produit le crâne de pierre : Molloy de Beckett notamment avec sa « pierre à sucer », La vie de Galilée de Bertolt Brecht avec sa « pierre preuve » et ce très beau vers d’un poète du Nord Pas-de-Calais « Autant que les nuages, un caillou me donnent le vertige. » (2)    
Enfin, la reconstitution est un moment particulier : chacun dispose d’une boîte étiquetée contenant des fragments à partir desquels il faut construire la forme indiquée alors qu’on pourrait tout aussi bien en imaginer une autre.
Pour donner de la valeur à des cailloux quelconques, j’ai passé des heures au pied d’une falaise en Bretagne à trier des cailloux que j’assemblais un à un pour former le crâne de pierre, une sorte de vanité « métamorphose de l’instabilité des formes du monde » (3) »

Séverine Hubard, extrait d’un entretien avec Albane Duvillier

(1)   Futur, ancien, fugitif de Olivier Cadiot : « Un matin j’avais retrouvé le bras de pierre découvert autrefois dans la forêt (voir : le bras de pierre ). Bras replié ressemblant à celui d’un ange de pierre recouvert de moisissure verte et bleu. On ne trouve pas un bras de pierre sans trouver le reste ensuite : culte ? Inversion de cadavres ? Technique rituelle ?» édition P.O.L  1993, l’île, chapitre 38, page 116.

(2)   Construire un arbre de Pierre Dhainaut

(3)    « …métamorphose de l’instabilité des formes du monde, des articulation de l’être, la perte d’identité et d’unité, qui le livre aux changements incessants; elle dit le monde en état de chancellement, la réalité en état d’inconstance et de fuite, et du même coup, liée à ce statut, la relativité de toute connaissance et de toute morale » Les traverses de la vanité, texte de Louis Marin extrait de Les vanités dans la peinture au XVIIeme siècle, Musée du petit Palais, 1990